Le site antique de Mandeure dans le Doubs, est une place majeure de la Séquanie. Fouillé dès le XIXe siècle, il a livré une quantité exceptionnelle d’objets, notamment en métal et en verre : outils, statuettes, parures, clochettes… Tout ce petit mobilier est aujourd’hui dispersé dans différents musées, dont les trois principaux sont le musée d’Art et d’Histoire de Montbéliard, le musée des Beaux-Arts et d’Archéologie à Besançon et le Musée d’Archéologie Nationale (MAN) à Saint-Germain-en-Laye. Les études qui lui ont été consacrées - inventaires de musées et travaux scientifiques - ne couvrent pas l’ensemble et sont, elles aussi, éparses. Autant de raisons qui rendaient nécessaire un inventaire systématique.
Rebecca Perruche, ingénieure de recherche contractuelle, a travaillé pendant six mois à la MSHE au récolement de l’ensemble des données portant sur le mobilier connu, métallique et en verre, du sanctuaire du clos du Château. Ce dernier est le plus ancien des sanctuaires de Mandeure et celui qui a été en activité le plus longtemps (IIIe s. av. J-C. - IVe s. ap. J.-C.). Le travail de Rebecca Perruche s’inscrit dans le projet de recherche expérimentale PlaeTEx (plateforme technologique expérimentale des artisanats anciens des arts du feu), porté par Valérie Pichot, archéométallurgiste à la MSHE. En effet, les archéologues prennent appui sur des études fines du mobilier pour expérimenter des techniques de fabrication.
Un inventaire raisonné
Rebecca Perruche a étudié un peu plus de 1000 objets : 546 parures en verre et 625 instrumentum, le petit mobilier lié à l’artisanat. L’inventaire décrit chaque objet, le domaine et la catégorie auxquels il se rattache (par exemple domaine de la production, catégorie artisanat du métal pour un outil) et ses caractéristiques disponibles (dimensions, datation, lieu de conservation etc.). Il comprend photos et renvois aux études antérieures. Les informations incertaines sont notées comme telles. « Il arrive – explique Rebecca Perruche – qu’en étudiant un objet, j’ai un doute, parce que ce type d’objet ne se trouve jamais sur un sanctuaire par exemple. L’objet a été trouvé sur le site de Mandeure, c’est sûr mais sans doute pas au Clos du Château. Je note alors localisation douteuse. Au XIXe, les fouilles et la documentation tirée des fouilles étaient moins rigoureuses qu’aujourd’hui. »
Le mobilier conservé au MAN et au musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon a été étudié principalement à partir de la documentation, celle des musées mais aussi les articles, thèses, mémoires réalisés par la recherche scientifique. Cela a nécessité un important travail de récolement des informations, dans la mesure où les objets ne sont pas identifiés par un même numéro dans les différentes sources. En revanche, le musée d’Art et d’Histoire de Montbéliard a prêté sa collection aux chercheuses, permettant son étude détaillée dans les locaux de la MSHE. « J’ai pu réaliser une véritable étude – précise Rebecca Perruche – prendre des mesures, vérifier, compléter des informations, faire un jeu complet de photos. Il existait quelques photos, mais elles sont anciennes et pas très précises. » Chaque objet a donc été photographié sous toutes ses facettes, et chaque photo ensuite traitée et redimensionnée à l’échelle 1.
Une collection exceptionnelle de clochettes
Le mobilier de Mandeure comprend une importante collection de clochettes. Pierre-Frédéric Morel-Macler, architecte de son métier, qui a fouillé le site de Mandeure dans la seconde moitié du XIXe siècle, affirme avoir découvert plus de 300 clochettes. Le musée de Montbéliard en conserve 62 – une quantité importante, dont Rebecca Perruche a tiré une typologie des formes. Cette dernière sera croisée avec une analyse de la composition du métal, réalisée par Valérie Pichot à l’aide d’un spectromètre à fluorescence X portable (p-XRF), prêté par le laboratoire IRAMAT à Belfort – une technologie sans prélèvement qui ne détériore pas l’objet. « Ce travail – explique Valérie Pichot – nous permet de savoir si on retrouve les mêmes types d’alliage dans toutes les formes, ou si une forme appelle plutôt un type d’alliage, et lequel. » Une connaissance précieuse que l’équipe de PlaeTEx réinvestira dans l’exploration des procédés de fabrication.
Photo de une : Rebecca photographie le pavillon du carnyx en alliage cuivreux
Sur le projet PlaeTEx : PlaeTEx, une plateforme d’expérimentation des arts du feu anciens