
Emmanuel Hamon, doctorant en archéologie (1), a dirigé la sixième campagne de fouilles consécutive du site de Verdun-sur-le Doubs en Saône-et-Loire – dernière étape du projet triennal visant à explorer la frange méridionale de l’agglomération gauloise. Ces recherches s’inscrivent dans le Projet Collectif de Recherche (PCR) « La confluence Saône-Doubs à l’âge du Fer », coordonné par Matthieu Thivet, ingénieur de recherche au laboratoire Chrono-environnement, et dans l’action « Confluence Saône-Doubs-Dheune » portée à la MSHE par Matthieu Thivet et Emmanuel Hamon.
Une douzaine d’archéologues et d’étudiants (2) de l’Université Marie et Louis Pasteur ont participé à l’opération menée sur cinq semaines l’été dernier. Environ 500 m² inédits ont été fouillés, permettant de lever un coin du voile sur la nature et l’évolution du quartier méridional de la ville gauloise. Les travaux se sont concentrés sur deux secteurs attenants aux emprises déjà fouillées lors des campagnes précédentes (fig. 2).
Dépôts de mobilier dans le secteur nord
Au nord, les fouilles ont mis en évidence la continuité d’un imposant épandage de mobilier, observé précédemment sur une trentaine de mètres de longueur, puis son arrêt net marqué par une large fosse. Cet ensemble livre des quantités exceptionnelles d’ossements animaux, d’amphores et de divers objets, tandis que la céramique, pourtant abondante ailleurs sur le site, en est presque absente (fig. 3). La nature volontaire de ces dépôts ne fait guère de doute pour les archéologues, bien que leur signification reste à préciser. Les dépôts semblent constituer une limite nette entre le quartier sud, principalement dédié aux activités artisanales, et l’espace septentrional, dont les éléments connus se rapportent à une zone à caractère domestique.
Dense occupation dans le secteur sud
Au sud, les fouilles ont mis au jour un secteur très densément occupé, avec environ 25 structures réparties sur seulement 150 m² (fig. 2). Les éléments les plus remarquables concernent un ensemble de quatre creusements linéaires, aux morphologies comparables. Ils contiennent systématiquement des restes de terre crue rubéfiée, vestiges uniques de l’usage du torchis dans la construction. L’un de ces creusements livre une plaque parfaitement verticale, sa position originelle pensent les chercheurs (fig. 4). La symétrie de ces creusements suggère qu’ils ont pu appartenir à un ensemble cohérent, peut être un bâtiment, dont la restitution reste toutefois incertaine à cette phase de l’étude.
Des puits richement dotés
En 2025, les conditions climatiques particulièrement sèches et la baisse du niveau des nappes phréatiques ont, pour la première fois depuis la découverte du site dans les années 1970, permis la réalisation de sondages profonds et rendu possible la fouille intégrale de plusieurs puits (fig. 5). Trois puits ont été explorés, chacun livrant son lot de découvertes :
• Le premier puits, dont le comblement supérieur avait déjà été en partie dégagé en 2024, avait livré un squelette humain ainsi que les restes de plusieurs animaux entiers (deux caprinés et un veau). La poursuite des investigations a révélé, dans le comblement intermédiaire, un nouveau lot d’ossements humains, essentiellement des os longs, ainsi que le dépôt d’un crâne isolé à la base du comblement.
• Le deuxième puits, inédit, a livré dans son comblement inférieur, un ensemble de vases-bouteilles, poteries destinées au service des liquides. Cinq vases ont été découverts intacts et plusieurs autres devraient pouvoir être reconstitués au vu de la quantité de fragments recueillis, grâce à l’analyse de la céramique. Ces dépôts viennent enrichir un dossier déjà abondant d’éléments susceptibles d’apporter des informations sur la diversité des pratiques rituelles dans les agglomérations gauloises du IIᵉ siècle avant notre ère.
• Le troisième puits, déjà en grande partie fouillé lors de la campagne 2022, a permis cette année de documenter et prélever les restes de son cuvelage en bois. Ce bois, resté en eau pendant plus de 2 000 ans, se trouve exceptionnellement bien conservé et permettra de restituer les techniques d’assemblage employées dans sa construction.
Une fois de plus, la richesse et la diversité du matériel recueilli sur cette agglomération témoignent de l’intensité des activités de production et de la vivacité des échanges commerciaux entre les habitants et le monde méditerranéen. A présent, l’attention des chercheurs se porte sur l’étude des structures et du mobilier mis au jour, en vue de la production du rapport de fouille et de la préparation de publications scientifiques.
Fig. 2. Plan général des structures mis au jours dans le secteur méridional de l’agglomération. Le plan des secteurs de fouilles 2025 apparaît avec un fond orthophotomosaïque issue d’une photogrammétrie (assemblage informatique de photos) aéroportée par drone. Acquisition réalisée à l’aide du drone MAVIC3M de la MSHE Ledoux. CAO E. Hamon
Fig. 3. Dégagement en cours des épandages de mobilier. Au second plan, les concentrations d’ossements animaux et de fragments d’amphores sont scellé dans le comblement d’une large fosse. © E. Hamon
Fig. 4. Plaque verticale de terre crue rubéfiée. Elément de parois en torchis en position primaire. © V. Franchini
Fig. 5. Puits en cours de fouille. © V. Franchini
Photo de une : Vue d’ensemble des emprises de fouille aéroporté par drone, en direction de l’est © E. Hamon
(1) Emmanuel Hamon est doctorant au laboratoire Chrono-environnement. Sa thèse s’intitule « Emergence et développement des communautés urbaines du second âge du Fer : le cas de l’habitat groupé de Verdun-sur-le-Doubs (Saône-et-Loire) ».
(2) 16 fouilleurs ont participé à la campagne, avec une équipe moyenne de 12 personnes simultanément. Les fouilleurs : Emmanuel Hamon, Matthieu Thivet, Rebecca Perruche, Vincent Franchini, Emilien Estur, Léo Legeron, Augustin Nicolas, Arthur Voisin, Aya Mellouk, Alvaro Vigueras, Céline Maicher, Clément Costille, Clémentine Giller, Nathan Dorier, Massaro Othilie, Fumey-Zaltzfus, Violaine Bourmaud, Simon Lepan, Maxime Dard, Nicolas Leger